Du mariage

(Vive Dubout.)

Il y a tout de même un truc que je ne comprends pas dans cette histoire de mariage homosexuel (sujet qui m’intéresse autant que l’univers impitoyable de la Bourse (…oui, certes, pardon)), c’est pourquoi l’Église Catholique se mêle de ce sujet (et s’y emmêle) à ce point-là. On parle bien de mariage civil*, non ? Pas du mariage religieux, en meringue, avec les chapeaux ridicules, les fleurs et le toutim ?

Tiens, d’ailleurs, la meringue, ça aussi c’est devenu cocasse. Jadis, la robe blanche était le symbole de la virginité ; aujourd’hui, elle est simplement le symbole du mariage lui-même, avec un petit côté « ce soir je serai la plus bê-êlleuh pour aller danser » totalement tarte. Je conçois bien que cela puisse tenter certains gays facétieux. J’avoue en revanche que je ne pige pas mes chères consœurs, sur ce coup. D’un côté, elles réclament qu’on ne les appelle plus « Mademoiselle » sur les formulaires, de l’autre elles tiennent encore à s’affubler d’une épouvantable robe de communiante revisitée par Disney pour jurer fidélité à leur clampin. Tout ça pour une union qui durera, une fois sur trois, moins de quatre ans. Je ne les comprends pas. (Je n’ai jamais compris les filles.)

Ce qu’il faudrait admettre, au fond, c’est que le mariage est purement et simplement devenu un consommable comme un autre, au même titre que l’Art Contemporain, le sport de haut niveau et la tablette tactile. Pourquoi s’étonner, alors, que tout le monde veuille convoler tous azimuts ? Il s’agit juste, pour pas mal de gens, gays ou pas, de cocher une case de plus dans la liste des trucs à faire avant de clamser. Et, bien entendu, de se trouver une occasion de « faire la fête » (expression qu’on finit par adorer autant que l’atroce « c’est que du bonheur ! » des victimes de la pub).

Faire la fête. Bon sang de bonsoir, entre nous, qui s’amuse à un mariage ? Vous vous êtes un jour amusés à un mariage, vous ? D’aussi loin que je m’en souvienne, je m’y suis toujours plus que profondément emmerdée. Sans mentir, même avec une rage de dents, je rigole plus dans une salle d’attente de dentiste qu’à une réception de « Just Married ».

D’abord, un mariage, c’est toujours loin, et ça a toujours lieu en plein milieu des vacances (de n’importe quelles vacances) – ou alors le jour même des départs ou des retours, histoire de corser le trajet. En y allant, on se paume ; une fois arrivé, on enfonce ses talons dans de la gadoue, ou on bousille ses chaussures neuves sur du gravier. Pour être validé à l’entrée, il faut s’habiller avec des fringues inconfortables, qu’on ne remettra jamais plus à cause de couleurs impossibles qui vous font irrémédiablement un teint vert olive. Il pleut une fois sur deux, le reste du temps il fait une chaleur à crever ou un froid de canard. Durant la messe, invariablement assommante, on s’oblige à garder bonne contenance pendant deux plombes en détaillant des vitraux sans intérêt. Ensuite, il faut aller dans des auberges ou des châteaux perdus au fin fond de la cambrousse.  Quand on arrive, le champagne n’est pas bon, le buffet a été pillé et on a froid (ou trop chaud). On parle de trucs dont on n’a pas envie de parler, tout en embrassant des tonnes de joues inconnues – cette manie d’embrasser des inconnus m’exaspère : ça ne tiendrait qu’à moi, je serrerais la main à tout le monde, et encore.

 Le dîner qui s’ensuit est trop long, tiède et pas bon. Pénible aussi, parce qu’on est systématiquement assis dans un courant d’air, à côté de gens qu’on ne connaît pas, avec qui on n’a en général rien en commun et qu’on ne reverra (heureusement) jamais. Les discours de fin de banquet sont quasiment tous identiques, pas drôles, avec des vues moches des « convolés » en barboteuse, et des sketches lourdingues à la pelle. Le dessert est toujours absolument immonde et trop sucré. Une fois debout (et plein de crampes et déprimé et mal aux pieds), il faut se battre pour réussir à mettre une main tremblante sur une tasse de café noir, seul plaisir de la soirée quand il est chaud et buvable (et c’est rare). Pendant que les invités se dandinent comme des bâtons sur des musiques ringardes tonitruantes, la mariée, à force d’embrasser des oncles et des tantes, commence à avoir l’air d’une déterrée. On ne la plaint pas, elle l’a voulu, elle est servie. Ceux qui n’ont rien demandé, en revanche, ce sont les pauvres gosses engoncés dans leurs rôles de demoiselles et de garçons d’honneur, toujours attifés comme des poupées du XIXe siècle. Les malheureux chouinent d’épuisement au bout (on les comprend) de six ou sept heures de prestation non-stop. Je les regarde à chaque fois avec l’admiration qu’on réserve au courage des innocents condamnés aux galères. D’ailleurs, vers la fin du pensum, on me trouve, en général, en compagnie des plus rebelles d’entre eux, en train d’essayer de crocheter la serrure d’une porte fermée pour enfin trouver un babyfoot, un flipper (y’en a jamais) ou une télé susceptible de diffuser un bout d’un épisode des Experts, ou la fin d’un match de foot (c’est dire notre désespoir profond). Ensuite il faut rentrer, ou passer une nuit dans un hôtel sinistre avant de rentrer. Enfin, il faut avaler du bicarbonate de soude pendant huit jours.

Qu’on se le dise : tous les mariages sont des corvées. Pour les parents des mariés, pour les mariés, et pour les invités. Je m’étonne que personne n’ait le courage de le clamer haut et fort une fois pour toutes, histoire de passer enfin à autre chose. Honnêtement, si ça durait deux petites heures autour d’un buffet bien chauffé, j’aurais peut-être eu envie, un jour, de me marier (ou d’aller à un mariage). Mais vu le truc, le coût du truc, et le résultat du truc, les bras m’en sont tombés il y a longtemps.

Je ne suis donc pas contre le mariage homo, de mon côté. Je suis juste contre tous les mariages, le mien compris. Et je vous jure bien que si jamais (car on ne sait jamais) il m’arrivait, par un hasard aussi improbable que pétrifiant, un jour, de me marier, personne, et je dis bien PERSONNE, ne serait invité. Quitte à se taper ce type de convention, autant faire ça vite, sans réclamer de cadeaux, et sans emmerder tout le monde. C’est ça, la générosité.

* Sinon, j’ai trouvé la solution qui contentera tout le monde : appelons « Union Civile » la cérémonie en mairie, et « Mariage » la cérémonie religieuse. Et voilà, plus de problème. (Du moins tant que les gays ne réclameront pas eux aussi le mariage religieux. Là, les calottes risqueront vraiment d’exploser.)

55 réponses

  1. Je suis parfaitement d’accord avec cette analyse profonde et je ne comprend vraiment pas pourquoi les gays qui se singularisent dans leurs mœurs amoureuses veulent singer la pire des mascarades héritée d’un double héritage : la cérémonie d’enrôlement de deux jeunes adultes dans la brigade de reproduction bénie par le Saint siège et la gabegie consumériste censée être le « plus beau jour d’une vie ». Quant aux déguisements obligatoires, je reconnais m’y être prêtée, aux rares mariages auxquels j’ai été conviée, toujours un peu honteuse de « m’endimancher » et cependant romanichelle si on considère le niveau attendu.
    Ca ne m’étonne pas que tu finisses avec les mômes, fuyant l’ennui mortifère que génère à coup sûr toute forme de « fête » obligatoire. Au fait Noêl c’est pour bientôt. icon_erk

  2. Sur le monde.fr dont l’ouverture aux non abonnés rétrécit proportionnellement à la vacuité du journal, j’ai lu, néanmoins , quelques articles intéressants sur la problématique de fond…Dans l’état de l’institution du mariage, ces réflexions pertinentes ou non, semblent correspondre à faire un puzzle ,en plein air, par temps de tempête de force 6.
    Après les fêtes de Noël, les fêtes De Pacs….. icon_yawn

    1. Même en me forçant, je n’arrive pas à m’intéresser à ce fait de société. J’peux pas, ça m’ennuie autant qu’un devoir de maths.
      :D
      Tiens, pour Le Monde.fr, suis d’accord. Pourquoi ils ne font pas comme le NY Times ? Au-delà de la lecture de six articles par semaine, hop, tu t’abonnes, ou tu attends la semaine suivante. C’est futé. (Mais il y a plus à lire dans le NYT en ligne que dans Le Monde en ligne.)

  3. J’ai quelques souvenirs de mariages désopilants. Il faut dire que nous prenions l’affaire en main, réquisitionnons, champagne et nourriture, soudoyons l’orchestre, sabotions l’installation électrique que nous réparions pour nous rendre, aussi indispensables que sympathiques et faire ainsi passer nos facéties… icon_lol

  4. @ Zoé : Hein, c’est vrai, quoi ! Sont fous, les gays. :)
    Ah là là, moi itou les déguisements spécial noces, j’ai eu. Excepté le chapeau idiot à voilette. Ça j’ai pas fait, les fou-rires déclenchés auraient secoué les églises.

    1. Ah mais quel dommage que je ne t’aie pas connue il y a quinze ans, je t’aurais invité au mien. Cela t’aurait réconciliée avec les mariages. Certes il pleuvait à seaux, mais « mariage pluvieux, mariage heureux », certes je portais une robe en dentelle blanche style années 20, mais… pas de pièce montée, pas de buffet tiède (il était froid, comme ça pas de problème) et chacun se plaçait comme il le voulait. Des copains musiciens, un peu de famille, beaucoup de rigolade, j’en garde un super souvenir. Et du coup, on explose toutes les statistiques de durées . Sinon, ton billet est hilarant. (je me demande si je ne vais pas me remarier, du coup, pour pouvoir t’inviter)
      icon_woot

    2. Héhéhéhéhéhéhé.
      Je te prie de ne pas te remarier. Ton mari et moi ne sommes absolument pas d’accord, tu m’entends ? Absolument pas d’accord.
      icon_question

    1. He missed this one, ’cause he has had a problem of « bielle coulée » on the Champs-Elysées this particular night. Said he was sorry, and ended up in a brasserie to eat a « choucroute maison » with some pals.
      That’s Wally… :)

    1. Hahahaha !
      Écoute, je viens de parler à ta maman, elle est parfaitement d’accord avec moi. Si tu te remaries, nous te rayons de notre testament. Adieu châteaux, parc, Rolls, vignes, statues, toiles de maîtres, diamants et dollars.
      (Alors hein ? kêk’tu dis d’ça ?)
      (On est impitoyables comme dans Dallas, nous autres.)

  5. Punaise, moi qui comptais vous filer un coup de pouce pour que ça aille plus vite. Faut que je vous garde en vie pour profiter, maintenant. Miseyre ! Miseyre ! Pourquoi t’abats-tu toujours sur les pauvres gens ?

  6. Un petit mot juste pour vous dire que si vous voulez vous loguer, j’ai ré-ouvert le système, Frédérique ayant eu des problèmes pour commenter autrement. Il se peut que pour certains, la connexion soit lente (OVH continue à avoir beaucoup de problèmes sur ses serveurs depuis août). Je ne peux pas hélas y faire grand chose, si ce n’est changer de plateforme (ce que je ferai peut-être si ça continue, mais bon c’est une grosse galère de migrer). Voilou. Bizou.

  7. Assez d’accord avec cette analyse… pourquoi tout ce braouf pour cette vieillotte institution alors que le PACS pourrait être amélioré s’il y a des trucs qui manquent ou des liens juridiques à mettre en place… Comprends pas.

    Par contre, ne généralisons pas avec la durée moyenne du couple ;-) Nous fêterons avec ma douce notre 30ème année de mariage (mais cela aurait pu être un autre truc…) et nous sommes très heureux de ça.

    Comme quoi icon_cool

  8. Moi qui croyais que le mariage impliquait « pour vivre heureux ,vivons couchés » …Du coup, ma pensée flageole du bout… icon_kikik

    1. Héhéhéhé.
      (Dis donc, tu t’es logué, j’ai vu. Si tu ne veux pas être modéré de nouveau, faut que tu commentes en logué, tu sais, comme je te l’avais dit… Envoie-moi un mail si tu as un problème.)

    1. (Scusez, un court moment de mauvaise humeur. Mais manager ce site avec les connexions constamment merdiques de cette plateforme commence à me taper sur le système.)
      icon_mad

  9. Salut électron libre,

    Les problèmes pour se loguer sont, foncièrement,difficiles. En cette période d’incitation à la beuverie, j’espère que ce message passera sans modération.
    icon_sorry

  10. … Au bout du compte….A vrai dire, je n’ai pas retrouvé tes explications ni ton mode d’emploi . Ce qui ne permet pas d’être comte dans l’ordre du Ni-Ni, normal ,suis un peu niais pourquoi le nier, en faire une histoire, juste un conte….

    1. A rien.
      MOUHAHAHAHAHA !

      (C’est ce que je disais à l’ouverture de ce nouveau site. Vu qu’on n’a plus besoin de taper un code, je ne vois pas vraiment l’intérêt pour l’instant. Mais ça peut servir à ceux qui, comme Fredaime, ont des probs pour commenter, éventuellement…)

  11. A la recherche de tes conseils égarés, je me suis baladé sur ton site , j’ai , particulièrement, apprécié les rubriques « illustration » et « fun » qui parlent du vide avec éloquence. Ton auto-portrait décrit bien la femme singulière que tu es et fière de l’être.
    Ce weekend , tu ne seras pas libre, bon courage et bon plaisir ,aussi! icon_smile

    1. Ne te moque pas, j’ai pas encore rempli le site, je vais à deux à l’heure, je suis dispersée, quoi. Mais c’est super long à faire, et je manque de temps, rhâ.
      icon_erk
      Sinon, merci ;) (et oui, bien vu, le Salon des Indés m’a engloutie ce week-end, scusi !)

  12. To be logged or not to be. That is the question. Fredaime nous annonce un « record  » de 15 années de mariage, mais ce n’est rien du tout ça. Ce n’est qu’à partir de 50 ans, juste avant l’inhumation dans un tombeau commun qu’on peut se vanter. Un peu de modestie ma petite Fredaime, pense à Joseph et Zica, ça c’est du solide icon_music

  13. Bon… Par où commencer ?
    Je viens d’atterrir sur ton site et évidemment tout est différent.
    Je suis sidérée comme les choses ont changé sur la blogosphère en quelques mois d’absence (presque tous les blogs ont changé et surtout disparu).
    Je dois donc en conclure que désormais ici, c’est chez toi :)
    Très joli décor.
    Tu as mon adresse email :) Mais je reviendrai ici :)
    PS : Je me suis mariée à Las Vegas et c’était très rock and roll :) (Marvin Gaye dans la chapelle et ZZ Top à fond dans la limo) …
    PS bis : Où je vis maintenant, le mariage de personnes de même sexe (c’est le terme officiel) vient d’être validé ; j’en suis assez fière :)

    1. Hello, Dive Bon-Sens ! Bienvenue dans mes nouveaux locaux, ouéééé ! C’est vrai que ça a bougé, le web, et que FB monopolise pas mal les surfeurs, désormais… Faire un blog, c’est déjà être un chouïa has-been, hahahaha !
      Terrible.
      Sinon, le mariage à Las Vegas, c’est le genre de truc qui fait fantasmer, quand même – plus que le divorce à Reno, hahaha !
      (Pardon de n’être pas venue te visiter depuis quelque temps, je suis un peu éparpillée depuis la rentrée, j’ai du mal à tout mener de front. Mais j’vais m’reprendre, non mais. :)
      En tout cas, te lire ici me colle un big smile, donc merci.

  14. Tu as vu le cirque que ça déclenche cette histoire de mariage!
    Un peu partout on en cause, on manif pour / contre (beaucoup contre!). Pendant ce temps là ça mitraille à plein tube tout là-bas et tout le monde s’en fout. Pffff!

    1. Tu mets le doigt pile poil là où il faut. Obni a bien résumé le truc, aussi. (Pour ma part, j’ai résumé ma pensée dans l’astérisque de fin d’article.)

  15. Les calottes se perdent, leurs explosions feront de petits dégâts, les Pères fouettards sont une espéce en voie d’extinction (de voix)…Manifestement, l’homo sapiens a gardé les gènes de l’homo erectus..Les formes de revendications de certains , les cortéges d’anathèmes des autres , témoignent d’une absence de respect et d’un sans gêne bordélique….Enfin, il n’y a plus de bucher, c’est déjà çà!
    icon_humpf

  16. Hier, dans la nuit, roulant dans le brouillard, pour chasser le cafard, dans la lumières des phares, j’écoutais , en alternance, France Musique et France Culture, J’ai oui citer une certaine Anne Koechlin…

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