La cuillerée qui tue

Y’a des moments où on n’a plus tellement envie de l’ouvrir. Pas qu’on soit enfin content de son sort – au contraire même, puisque tout continue à aller de traviole dans tous les domaines – mais parce qu’on ne sait plus très bien par quel bout prendre l’espèce d’énorme pelote de connerie humaine qui nous enserre chaque jour un peu plus.

C’est fatiguant de se dépatouiller de tout ça, de chercher sans arrêt le bout d’un truc qui n’en finit pas de s’embrouiller, surtout quand ce qui nous aidait encore un peu il y a quelques années, c’est-à-dire les cervelles des gens qui œuvraient vaillamment à clarifier les choses, nous lâche en cours de route – ou, pire encore, nous ligote un peu plus.

C’est ça, le problème du règne de la quantité sur la qualité. 40 Unes de journaux mêlées sur les dieudonneries des uns, et 40 autres sur les frasques sexuelles d’un gars qui, tout juste arrivé à l’Elysée, aurait demandé à l’huissier qui lui faisait visiter les lieux par où sortir sans être vu, ça vous assomme un être intelligent pour un bon mois, sinon plus. Comment voulez-vous, ensuite, vous intéresser aux événements vraiment importants, soit tout ce qui, autrefois, faisait à juste titre la Une des journaux, et qui est maintenant relégué en tout petit en page 12, entre une pub pour shampoing et la critique dithyrambique d’une mauvaise comédie ?

Heureusement, toutes choses bues jusqu’à la lie, il reste et restera toujours de quoi rigoler. Jadis, on écrivait des libelles pour se moquer des puissants et des princes. Pamphlets, satires, ou billets injurieux, qui réjouissaient les foules et les vengeaient un peu, couraient les rues et les marchés. C’était d’ailleurs si dangereux pour le pouvoir qu’avant la Révolution, la plupart des libellistes se planquait sous des pseudonymes pour ne pas se faire écourter.

Comment aurait-on, sous la Restauration, assaisonné ce « Par où j’pourrais sortir sans être vu ? » Comment se serait-on gaussé des puissants, des marchands du monde ou des médiocres « quenelleurs » ? Paul-Louis Courier, redouté pamphlétaire, l’aurait su, lui qui écrivait en son temps : « Laissez le gouvernement percevoir des impôts et répandre des grâces ; mais, pour Dieu, ne l’engagez point à se mêler de nos affaires. Souffrez, s’il ne peut nous oublier, qu’il pense à nous le moins possible. Ses intentions à notre égard sont sans doute les meilleures du monde, ses vues toujours parfaitement sages, et surtout désintéressées ; mais, par une fatalité qui ne se dément jamais, tout ce qu’il encourage languit, tout ce qu’il dirige va mal, tout ce qu’il conserve périt, hors les maisons de jeu et de débauche. »*

Vu la gabegie de la presse et le vide intersidéral de la télé-marchande, il est probable qu’aujourd’hui, un Courier ou un Cormenin auraient tenu un blog.

Pour caresser un peu vos neurones épuisés, cliquez ici et lisez donc tranquillement ce génial « Pamphlet des pamphlets », ode à l’esprit critique, à la liberté de dire et de rire, petit bijou mis en ligne par la Bibliothèque Municipale de Lisieux. « L’Anglais navigue, l’Arabe pille, le Grec se bat pour être libre, le Français fait la révérence, et sert ou veut servir ; il mourra s’il ne sert. Vous êtes, non le plus esclave, mais le plus valet de tous les peuples », dit sir John Bickerstaff, l’ami anglais cité dans la deuxième partie de ce savoureux texte. Évidemment, ces propos d’un autre temps ne peuvent absolument pas convenir à la situation actuelle ni refléter, ne serait-ce que d’un minuscule éclat, la vérité de notre époque, n’est-ce pas ? Non, non, non, évidement. Et il est entendu que la petite phrase de sir John lui vaudrait, aujourd’hui, une série complète de plaintes judiciaires parfaitement méritées.

D’ailleurs, il est déjà quatre heures. Votre humble serviteur.

Le Titanic s’enfonce
Par l’avant, par l’arrière
Y’a pas assez d’chaloupes
Trop d’pauvres dans les soutes…
« Les riches et les puissants d’abord ! » braillent les officiers
« Par où j’pourrais sortir sans être vu ? » demande alors le capitaine
« Par où j’pourrais sortir sans être vu ? »

* Pas sûr que Courier, grand helléniste devant l’Éternel, ait lu Lao Tseu. Toutefois, il aboutit aux mêmes conclusions que le Vieux. Ce qui tendrait à prouver, si besoin était, que les sages grecs et les sages taoïstes ont beaucoup en partage.

36 réponses

    1. On pourrait continuer… :)

      Sur les pelouses millionnaires
      Un bras d’honneur pervers
      Et le Systèm’, sans crier gare,
      Priv’ de ses picaillons sa star…
      « Le flouze et les contrats d’abord ! » braillent les officiels
      « Par où j’pourrais sortir sans être vu ? » demande alors le footballeur
      « Par où j’pourrais sortir sans être vu ? »

  1. Ce monde est, aussi, louche qu’anesthésiant, une masse de gens ne se sentent pas dans leur assiette, sont à couteaux tirés avec leurs banquiers et sont à ramasser à la petite cuillère.
    Vaste programme que vouloir endiguer la connerie, Rien que de la cerner , il y faudrait plus d’un ouvrage et de l’ouvrage , il y aurait ! L’utilité du pamphlet ? La quantité de pamphlet a trop enflée, elle tue et fait le pamphlet taire. Il fait partie du jeu de communication, il est devenu une arme de gouvernance, une distraction, des jeux du cirque par inflation d’humoristes, tout devient guignol. Un président adopte les théories vaseuses de l’offre d’un certain Say . Économiste libéral tenant de l’offre qui crée la demande, il est bien connu que la faim vient de ce qu’il y a de la nourriture, la preuve ? bien nourrie ou affamé , la vie a une fin.Si ce zigoto de Say dit qu’il sait, c’est qu’il doit le savoir, pourquoi se poser la question, le Monde.fr s’en fout puisque la vie privée attire un plus grand public, elle ne regarde personne mais intéresse les foules, Ça tout le monde le sait . La politique du laisser faire s’introduit entre les sphères privées et publics. La concubine en titre passe du statut de première dame de France à celui de premier drame de France. En politique , comme ailleurs, on ne fait pas d’omelette, sans casser d’œufs. Pour distraire l’électorat des mauvaises tambouilles , la recette est éculée. Une belle paire d’oeufs- est- ce suffisant pour faire l’omelette sans eux ? interrogea le prez ne sachant plus à quel sein se vouer et se sentant un peu à poil à ses communicants . Bien sur répondirent ils, ils vont se poiler.Sans closer davantage, notre prez endosse la défroque de Don Juan pour divertir la popu-lasse. Quoiqu’il fasse, il se plante ; autant perdre la face dans une histoire de fesses et puis nous sommes au temps de la troisième d’enarque, autant solder la promotion Voltaire, la libertine…Mieux vaut queutard que jamais.La première concubine est envoyée à la lanterne pendant que l’autre jouit de la prise de la pastille..Elle a réussi , à son corps défendant, un peu trop apparemment, elle n’a pas assez payé de sa personne, une jolie vengeance, la journaliste qui perdit le match. Son coup de blues hospitalisé fit jaser le tout Paris, il est goujat avec les couguars , le Prez
    Dans le Var, le premier ministre a vu être ,le premier, le sinistre. Il est un expert en catastrophe, débordé sur la droite , la gauche, le centre.Sa politique fait eau de toute part, ses propres ministre , l’enverrait bien valser, ce n’est plus Matignon mais Ma-quignon avec déconfitures variées. Comme à son habitude, il ne s’est pas mouillé, il a survolé la question en hélicoptère, il a évité de parodier Mac le Con et promit pour bientôt l’état de catastrophe naturelle,très différent de l’état de catastrophe ministérielle. L’état indemnisera , si ce n’est pas à Pâques ce sera à la Trinité qui mérite aussi la solidarité…. La presse nous inonde de témoignages émouvants, les pauvres gens sont débordés par une compassion passagère qui a pour principale fonction de noyer les questions de fond qui devraient couler de source sur l’entretien des rivières, les règles d’urbanisation et de construction., mais voilà trop d’Argens et manque d’argent, en attendant une nouvelle télé , lisez le gars Poe…Non, le slogan n’a pas changé «  Achetez les pieds dans l’eau, demain comme Hyères » …c’est fatiguant à la londe, les morts….Dieu lui est dubitatif , il songerait à lourder son portier, il se demande « A quoi sert, Pierre »…Allez courage, l’important est de rester un homme, de boue et pour les assurances dites « A l’eau, Ah l’eau… »
    Le Paris Tocard est fini….A Dakar, capitale du chili , les archéologues sont sur la piste d’une nouvelle plaie d’Egypte….En France , les routes deviennent le Pari Radar….

    1. Hahahaha !
      J’adore ton « La première concubine est envoyée à la lanterne pendant que l’autre jouit de la prise de la pastille », notamment.
      Ah, ces aristos… C’est pas la tête qu’y faut leur couper, au fond.
      :D

  2. PS….(le bateau qui coule, comme on dit à Paris, il faut sauver la p’tite annick)
    Certains pensent que Gattaz est le premier ministre, je parle , moi, du héros au regard sey-doux . Elle est extraordinaire cette actrice qui a l’art d’insinuer qu’elle ne savait pas que le 7° art existait , que sa famille travaille dans les pellicules chez pétrole Hahn ..Le G’o mon songe!!!

  3. dernière nouvelle:
    Les grands fauves qui nous baisent, débordés les zoos en furie se sont mis d’accord, les zozos pour une politique de bas étiage…. »Le vent se lève » le grand zéro est arrivé. Et copé, au nom prédestiné que devient-il?
    Dans le sud , les idées Fhaine se propagent, nouvelle grammaire de l’aversion latrines…
    Après les vagues du mariage pour tous, il fallait é-gayet les ménages, le prez est exemplaire! Plus normal que lui tu meures, et c’est bon pour le moral. A chacun sa Julie ou un Jules….Quand la politique capote autant touiller à la sauce Deschanel !

    1. Tu crois qu’au prochaines élections, on se dira « M’en fous qu’Hollande ait coulé, j’ai Copé » ? :D
      Ou « Faudrait penser à aller au Borloo » ?
      Ou « Vive le Pen-Duick » ?

      Ah, mondiou. Vite, un canot, des rames, un peu d’tabac, et mes rations d’survie.

  4. Des gens qui t’expliquent que la civilisation, c’est marier les homos ou faire des procès aux mots, un gros teint qui fait son gigolo à l’heure de l’apéro tout en raclant l’impôt dans son tonneau, dans l’genre barjos pas rigolos on a rarement fait plus salauds. Et si tu veux sauver ta peau de ce mauvais casino, le scénario est écrit, t’es forcément un nazi. On connait si bien la chanson, faut déchirer la partition, virer l »Hollande et couler l »Ayrault avant que tout le bateau ne sombre dans la dette Euro

    1. Oui, gloub gloub gloub ! :D
      Marier les homos ne me gêne pas (après tout, hors religion s’entend, le mariage est une tractation sociale et financière, ni plus ni moins). Par contre l’application à l’aveuglette des préconisations d’austérité du FMI et de Bruxelles pour, soi-disant, éponger la dette, c’est véritablement tenter de sauver un navire qui coule en écopant au dé à coudre l’océan qui s’engouffre (après avoir lié les bras de ceux qui écopent), tout en maintenant le cap vers d’autres icebergs.
      L’immense hypocrisie de tout cela est insupportable. On vous fait croire à plus de liberté en vitrine, alors que dans les soutes, on serre de plus en plus les vis, sans chercher un autre chemin que celui, désastreux on le sait, déjà suivi. Et pendant ce temps, le commandant de bord mène la vie d’un bourgeois du XIXe siècle, s’inquiétant d’abord de ses petites affaires avant de s’intéresser aux grandes (… et donc, avons-nous, finalement, besoin d’un commandant en chef ? Dans les films de pirates, on finit par le débarquer sur une île déserte pour pouvoir enfin s’attaquer aux problèmes du navire…) :)
      Et sinon, oui, les ânes sont nombreux à braire, hélas. Le simplisme des esprits naît du mensonge érigé en dogme.

  5. « les petites affaires » du grand bourgeois décoincé excite la fibre humanitaire de son harem. La première concubine a bombé le torse, elle s’envoie en l’air pour présider un gala humanitaire au pouilleux taj mahal « la lumiere du palais ». Elle part dans une ambiance électrique, conduite par un chauffeur qui a eu pour consigne d’éviter Sèvres Babylone. La seconde concubine se consacrerait au don d’orgasmes…..Pendant ce temps, les deux François papotent sur les inconvénients respectifs de l’infidélité et de la pédophilie. Le pape aurait refuser un téléphone mobile, cet appareil sans fil….

  6. Comment veux tu que la démocratie fonctionne avec tous ces gens qui naissent potes?

    La fatalité des mots veut qu’un hollande mette le pays bas!

  7. Ah, je n’ose imaginer les merveilles que Daumier aurait pu produire à partir de Moi-Président, digne héritier du Louis-Philippe piriforme et de l’autre « Quenellier » à la barbe suspecte!

  8. Les rats pilleurs ,à tous les étages, s’intéressent à l’inversion des courbes du fromage à leurs profits…..Si Hollande se trouve dans les choux ,l’ami Molette surgira . Le prez a besoin d’un bol der pour endiguer la dégringolade de sa côte de popularité pendant que les grues errent tout est dans le -menthal

    1. Hi hi hi… Il a lancé la mode, j’pense. Ce qui veut dire que ça fait un bail qu’on exaspère les autres pays…
      (N’empêche. Kêkchose me dit que ce qu’il avançait n’est pas faux.)

  9. Ton pilote favori va mieux. Il fait vroum vrom en dormant. C’est un meccano de ferrari qui a diagnostiqué le ronflement. Depuis il a été mis dans une chambre de F1…

  10. C’est vrai que c’est fatigant, surtout quand la fatigue est chronique… un clou chasse l’autre… un camembert qui pue amène un maroilles qui ne vaut pas mieux. Et pour expliquer les ressemblances, on parle de conjoncture, d’état de la France, de l’Europe, de Bruxelles… comme si on nous avouait que le Système fonctionne tout seul indépendamment de toute volonté.
    Tiens, j’ai entendu que la Turquie veut encore entrer dans l’U.E. Juste au moment où la situation économique turque est en train de s’effondrer, quand l’Ukraine veut adhérer aussi… bouée de sauvetage européenne provisoire.
    Je suis en passe de m’embarquer pour Mars. Y a du monde intéressé ?

  11. Bon sang. C’est le printemps dans un mois, et j’ai rien vu de l’hiver. Une taupe, j’vous dis. Une taupe.
    J’écris un billet dès que possible. Là j’vois rien, je suis en apnée totale à enquiller charrette sur charrette. Scusi.

  12. Pour Mars, c’est complet , les gens se battent pour être dans la queue, les cris sont insoutenables  » Mars ! supplie l’ami »….

    1. J’pense qu’on va se faire bouffer… Mais soyons durs à mâcher, ayons mauvais goût, soyons très épicés, poivrés et salés, restons lourds sur l’estomac, devenons d’imbattables vomitifs ! :D

  13. Peu ou proue, les riches ont le vent en poupe….Dire que les pauvres marins du Titanic attendaient la quille….Certains se saoulèrent une dernière fois, les cœlacanthes virent arriver des marins saouls , puis ils observérent rodèrent les sous marins jouer à la bataille navale, sous l’eau, blasés , ils n’en firent pas un Papin…
    Tu as bien choisi ton sujet pour entrer en apnée, ton blog atteint des profondeurs abyssales, quoique nous sommes habitués à tes réflexions bien pensées…

  14. Ma chère Sophie,

    vous citez le subtil et corrosif Paul-Louis Courier. C’est déjà un signe que, décidément, vous ne comprenez rien à la modernité, à l’hyper-modernité… et c’est tant mieux.

    1. Bonsoir, cher Philippe. Désolée de vous répondre aussi tardivement, je suis en train d’explorer la grippe hivernale depuis deux jours (et ma foi, elle est costaude, j’ai tapé 39,3° hier au compteur, hahaha !)
      Oui, je crois que je suis irrécupérable, pour l’hyper-modernité… :D Mais vous en êtes un autre (et je vous en félicite aussi !)

Répondre à Sophie K. Annuler la réponse